Le mois de juin aura été riche sur la scène des ventes aux enchères à New York, les trois principaux concurrents se sont succédés avec une belle réussite au global, au total près de 20 millions de dollars de montres seront tombés sous le marteau.
montres de grandes marques américaines
Sotheby’s
Sotheby’s comme à son habitude ouvrait le bal avec une vente le 7 juin avec un catalogue comprenant un large ensemble de montres contemporaines qui ont toutes trouvées preneurs pour les 50 premiers lots dans la fourchette de prix des estimations. Ces résultats sur des pièces contemporaines sont un bon signe pour le marché qui se cherche depuis le début de l’année sur ce secteur difficile avec les surplus de stocks des groupes horlogers.
Si certaines des montres vintage « time only » ont difficilement trouvé preneur pour quelques-unes dans cette vente, il est à noter quelques très bons résultats comme le lot 119, Cartier Santos première génération des années 1925, qui a quadruplé son estimation basse pour se vendre au final à à 16’250 $. C’est une parfaite illustration du marché des montres vintage depuis le début de l’année 2017.
En effet, les collectionneurs cherchent avant tout des pièces dans un bel état, plus que jamais ils sont focalisés sur la qualité des montres vintage, c’est ce qui fait la différence au final dans les adjudications. On retiendra également le lot 260, une Breitling Cosmonaute en acier circa 1960 qui s’est également envolé au triple de son estimation à 16’250 $. Des signes qui confirment la tendance sur le vintage.
Dans les résultats intéressants, la série des trois montres modernes tourbillon de Greubel Forsey se sont vendues, avec plus ou moins de succès, le plus net pour le lot 334, le double tourbillon en or rose qui a doublé son estimation à 200’000 $. Enfin, un résultat qui est encourageant pour les 75 ans de la Calatrava de Patek Philippe, le lot 357, référence 96 en or blanc circa 1928, exemple rare revendu par Eberhard à l’époque, vendu le double de son estimation à 37’500 $.
Mais bien au-delà de ces pièces qui ont su attirer l’œil de l’expert, il faut aussi noter la vente dans son ensemble qui reste l’une des plus équilibrées de la saison chez Sotheby’s toutes capitales confondues (Genève, Hong Kong).
Au total la vente a réalisé un chiffre d’affaires global de 7 433 501$ pour une moyenne par lot de 23 979$. Sur la globalité de cette vente, sur les 368 lots proposés, il y avait 62 lots Rolex contre 66 Patek Philippe, en valeur 1’386’750 $ et 2’745’250 $, soit pour près de 55% de la vente dans son intégralité. « Match Point » pour la marque Patek Philippe chez Sotheby’s. En moyenne, 22 367$ par lot vendu pour Rolex contre 41 595$ pour Patek Philippe. Une fois encore les deux marques se disputent les plus belles enchères.
Patek Philippe arrive en tête avec une pièce moderne à grande complication, lot 374, adjugée 444 500 $ juste à l’estimation basse, un prix en adéquation avec le marché aujourd’hui pour une référence 5016 en platine.
Seule compensation, la très bonne tenue dans ce registre des montres modernes à complications, une Richard Mille, lot 336, vendue 396’500 $, RM008, parmi les pièces de plus en plus recherchées dans les ventes spécialisées, surtout si l’on observe les récents succès de la collection Picciotto chez Phillips en mai dernier à Hong Kong.
Cette vente de Sotheby’s a été solide dans ses résultats avec des résultats stables et à la hausse pour certaines montres contemporaines d’horlogers indépendants.
Christie’s
Le 21 juin dernier avait lieu la vente la plus attendu de ce mois de juin, celle de la maison de vente Christie’s, sous l’impulsion de son directeur international, John Reardon, qui avait réuni un très bel ensemble de montres vintage et historique.
L’œil de l’expert tient à saluer d’ailleurs l’initiative audacieuse de ne représenter sur la couverture du catalogue une montre mais plutôt la photo seule en noir et blanc de Jacky portant sa fameuse Cartier Tank.
Une personnalité historique du XXe siècle qui porte à son poignet une icône de l’histoire de la montre bracelet, le cocktail était explosif et l’on pouvait s’attendre à une vive bataille d’enchères, ce qui fut le cas indéniablement. Mais si le prix record de près de 400’000 $ a pulvérisé l’estimation basse, l’identité du dernier enchérisseur, Kim Kardashian, a littéralement stupéfait la planète montres, après les révélations du blog Hodinkee.
Il me semble intéressant de se pencher sur cet achat qui est symptomatique de notre époque, une légende Jacky qui rencontre une star de la planète people, Kim, au travers de l’une de ses montres préférées, c’est indéniablement le signe que la provenance est un atout essentiel pour promouvoir « l’Art des Montres ».
Depuis des années, les montres battent des records et cette enchère relève de la rencontre entre deux mondes qui fascinent, celui de l’histoire des Etats Unis pendant l’âge d’or des années 60 avec Jacky, épouse de JFK, Président qui a le premier utilisé l’expression « La Nouvelle Frontière » pour anticiper sans doute notre monde d’ aujourd’hui, et celui de Kim Kardashian, la personnalité la plus en vue de cette « Nouvelle Frontière » contemporaine des réseaux sociaux, ou chacun vit sa vie par procuration dans un monde digital et virtuel.
Loin des coups de publicités éphémères de Kim Kardashian, je pense que cet achat de la montre de Jacky est très emblématique de notre époque. Kim Kardashian a su se donner une nouvelle image avec bientôt cette montre mythique au poignet, ce qui ne manquera pas également de faire rejaillir par effet de ricocher l’histoire si riche et prestigieuse de la maison Cartier. Voici le trio gagnant de ce mois de juin 2017.
Si Cartier a brillé lors de la vente avec cette enchère historique, le résultat global aura été à la hauteur des espérances de la maison Christie’s avec un chiffre d’affaires supérieur à celui de ses deux principaux concurrents à New York.
Sous le titre élogieux « montres rares et icônes américaines », Christie’s a su se hisser au premier rang des enchères avec plus de 10’028’500 $, pour un prix moyen par lot de 54’800 $.
Mais la tendance qui donne souvent Patek Philippe en tête ne s’est pas vérifié cette fois-ci, Rolex arrive largement en tête des enchères pour 43 lots vendus avec un montant de 3’251’250 $, à contrario Patek Philippe, pour 42 lots affiche seulement 2’205’250 $.
Signe de ce début de saison, Rolex est en passe de devenir la marque numéro un sur le secteur des enchères. Un fait qui se confirme de plus en plus sur toutes les places de ventes aux enchères.
Dans la rubrique des montres contemporaines, un coup de chapeau encore à la marque Richard Mille qui décroche la première marche du podium pour le lot 228, adjugé 1’207’500$.
Mais le catalogue Christie’s était aussi largement orienté vers des modèles vintage de la marque Heuer sur lesquels on retiendra des enchères importantes comme le lot 15, ce modèle emblématique revendu par Abercrombie, dont l’estimation de base a été multiplié par trois à 60’000 $, tout comme le lot 20, le célèbre modèle Monaco dans sa version PVD noir baptisé « Dark Lord », vendu à 43’750 $. Pour clôre le festival des enchères Heuer, certainement l’une des pièces les plus chères de ces deux dernières années, le lot 239, vendu presque au double de l’estimation basse à 199’500 $.
Antiquorum
Enfin, les enchères à New York ont également fait l’objet d’une session riche avec la maison de ventes Antiquorum, maintenant autonome sous le site historique en .com alors que Genève et Hong Kong ont adopté un nouveau site en .swiss depuis le mois de mai dernier. La vente ayant eu lieu le 22 juin dernier, cette dernière a sans doute bénéficier de la dynamique de Christie’s avec des enchères solides et certains résultats notables dans le domaine du vintage.
Avec un produit total de 2’623’130 $ et un prix moyen par lot de 14’573$, nous avons pu observer de belles enchères comme le lot phare de cette vente, la Rolex Daytona « Paul Newman » Ref. 6239 avec cadran « tropical » vendu au triple de l’estimation basse à 209’000 $. Rolex a également remporté le « match point » de très peu face à Patek Philippe avec 42 lots proposés pour 882 188$ contre 22 lots et 802 600$.
Sur le plan des montres vintage, il y a eu des enchères intéressantes mais la plus symptomatique du marché reste le prix atteint par le cadran et les aiguilles de la Turn-O-Graph Rolex Ref. 6202, 14’375 $ soit plus de dix fois l’estimation basse. Il est en effet intéressant de voir que le marché s’intéresse de plus en plus à tous ses accessoires qui ne sont qu’une partie de la montre certes, mais la plus importante pour les collectionneurs, le cadran.
De toutes les montres vendues aux enchères ces derniers temps à des prix record il n’est pas étonnant de voir les cadrans toujours avec leur patine d’origine, ce qui donne de la valeur à la montre vintage par-dessus tout. Alors il est important de bien mettre en lumière cet aspect, lorsque le boîtier, cadran et mouvement sont avec une belle patine d’origine, il n’y a plus de limite de prix. Ajoutez-y une belle provenance et vous obtiendrez un record !
Autant de points positifs sur le marché qui nous conduisent à la conclusion que nous sommes en ce moment dans un marché sélectif, quelques soit le lieu de la vente, il faut être sélectif pour réussir les ventes qui se succèdent aux quatre coins de la planète.
Ce qui nous amènera à vous parler dans le prochain Œil de L’expert des tendances des ventes estivales de Monaco sous l’impulsion de l’un de ses acteurs historiques, la plus célèbre des maisons de ventes françaises, Artcurial, qui vient de faire son premier tour de piste avec les automobiles de collection avec un résultat de plus 10 millions d’euros le 2 juillet dernier, ce qui conforte son leadership sur le rocher monégasque, avant une série de ventes estivales Horlogerie, Joaillerie et Hermès, devant la nouvelle concurrence des acteurs locaux HVMC, Boulle et Antiquorum qui seront présents sur le secteur des montres de collection.